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Chadôgu : chawan !
Ci-dessous : Wamono, Hagi-yaki chawan

 

141012 -chadôgu (茶道具) > Chawan (茶碗)

Beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses à dire sur le sujet….
beaucoup trop en fait !
;-)

Contentons-nous pour l'heure de brièvement évoquer les grandes catégories de chawan utilisées dans le cadre de chanoyu (par ordre d'importance) :

- Karamaono (唐物) : désigne toute chose fabriquée en Chine. Lorsque chanoyu est introduit sur le sol japonais, tous les ustensiles nécessaires à la préparation du thé sont importés du continent en quantité plus que limitée. Tout ce qui est rare étant cher, c'est sans doute pour cela qu'encore aujourd'hui, les karamono constituent la catégorie de chawan la plus formelle.

- Kôraimono (高麗物) : désigne toute chose fabriquée en Corée. La Corée semble avoir beaucoup influencée l'émergence du wabicha (わび茶 - le thé dit "de la simplicité" ) incarné par (entre autres) le fameux maître de thé Sen no Rikyu. A la différence des karamono, les bols coréens adoptés par les praticiens du wabicha, n'étaient pas spécialement conçus pour le thé. Il s'agissait le plus souvent de bols utilitaires fabriqués "à la chaîne" (ce qui explique leur forme bien souvent dissymétrique).

- Wamono (和物) : désigne toute chose fabriquée sur le sol nippon. Concerne donc les bols japonais. Toujours sous l'influence du concept de wabi, certains maîtres de thé japonais commencèrent à réaliser ou faire réaliser des bols par des artisans locaux. D'abord sous forme de copies de karamono ou kôraimon, puis des archétypes proprement japonais ont peu à peu fait leur apparition, se détachant complètement des modèles originaux du continent. Le plus connu de ces archétypes est sans doute le raku-yaki (楽焼).

 

à suivre… (ou pas)

 


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Shokudai - 燭台
Shokudai - 燭台

 

 

140529 - Shokudai - 燭台

Dans mon projet de sôan, il n'y aura pas d'arrivée électrique. L'éclairage se fera donc à la bougie. Les rôshoku ( 蝋燭 - bougies japonaises traditionnelles) sont réalisées à base d'une matière végétale ( , d'où leur nom, le terme générique "shoku" désignant une bougie) enroulée autour d'une mèche en joncs séchés ou en papier. La particularité des rôshoku est que contrairement aux bougies en cire ou en paraffine, ils ne coulent pas en brûlant (la matière végétale s'évapore).

De manière générale, disons qu'il existe deux manières d'éclairer l'intérieur d'un chashitsu dans le cadre de chanoyu : les rôshoku et les tomoshibi (燈火 - lampes à huile). Ces derniers comportant plusieurs mèches (tôshin 灯心) apportent une luminosité plus importante que les rôshoku et serviront d'éclairage "d'ambiance" (la lampe reposant sur un support vertical, la flamme est placée plus haute et diffuse donc plus largement sa lumière). L' appoint lumineux est apporté par un ou plusieurs autres shokudai (燭台 - bougeoirs) pour éclairer des "endroits" stratégiques" comme l'espace situé devant le teishu (c'est à dire, là où il prépare le ou les bols de thé), près du ro ( - le foyer enterré), etc.

Pour un yobanashi (夜咄 - rencontre de thé nocturne) dans un chashitsu de style sukiya (comme un sôan) et selon les préférences des écoles de thé, on utilise généralement un tomoshibi (de type tankei ou chikukei) et un ou plusieurs shokudai (de type kotomoshi/kotoboshi ou encore teshoku , bougeoir fait en métal muni d'une poignée, le kanji "" voulant dire "main"). Chez Sohen ryu Shodenan (宗偏流正伝庵), des versions plus wabi de ces objets sont préférées pour éclairer ces petites pièces dites "rustiques". J'apprécie beaucoup cette approche, car cela permet à tout un chacun de fabriquer ses propres shokudai de la plus simple des manières qui soit, tout en offrant la possibilité d'exprimer sa créativité.

J'ai réalisé ce shokudai (inspiré par celui mon sensei, Gilles Sôki Maucout) à partir d'une simple pièce de bois flotté (ramassée sur la plage) dans laquelle est inséré un pôle de bambou incliné. Sur ce dernier est fixé une petite plateforme en bois sculpté munie en son centre d'une pointe de baguette (ohashi, comme celles qui servent à manger !) sur laquelle on peut "planter" un rôshoku qui sera ainsi maintenu fermement en place (la base des rôshoku est creuse, comme celles des bougies allant sur des chandeliers).

Prochaine étape (dans mon interminable liste de "choses à faire") : la fabrication d'un tomoshibi "rustique", toujours dans le style Sohen ryu Shodenan.


à suivre… (ou pas)

 


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chadôgu (茶道具) >Chasen (茶筅)

chadôgu (茶道具) >Chasen (茶筅)


 

140330 - chadôgu (茶道具) > Chasen (茶筅)

Que cela soit dans le cadre strict de chanoyu ou le simple (mais tout aussi honorable) plaisir de préparer un matcha (pour soi ou autrui) dans un cadre informel, s'il est bien un ustensile aussi incontournable qu'irremplaçable, c'est bien le chasen. Ce fouet en bambou est entièrement réalisé à la main. Impossible d'usiner cet outil dont les délicates "pales" requièrent toute la dextérité et la délicatesse d'une main experte. La ville de Takayama (au nord de Nara) reste aujourd'hui le plus célèbre lieu de production de chasen de l'archipel et ses chasen sont réputés pour être les meilleurs.

Il semble évident que le processus de fabrication d'un chasen demande beaucoup de dextérité et de minutie. Tout commence à partir d'un tronçon de bambou qui aura séché pendant au moins 3 ans. La partie au dessus du noeud est fendue en 16 parties égales (chaque "brin" mesurant alors approximativement 5mm de largeur). Puis la partie interne de chacun des 16 brins est ôtée de manière à ne garder que la surface extérieure avec une épaisseur d'1mm seulement. De nouveau, chaque partie est divisée en 10, alternant des brins de 0,6 et 0,4mm ! Les brins les plus gros (plus solides) seront repoussés vers l'extérieur, tandis que les plus fins formeront le "bouquet" central du chasen. L'ensemble des brins est ensuite plongé dans l'eau (pour les attendrir) et à nouveau affiné sur leur partie supérieure et interne afin que "leur épaisseur ne soit guère plus importante qu'un cheveu". A ce niveau, c'est l'expérience de l'artisan qui prime : il travaille plus à l'instinct qu'à vue. Viendra ensuite l' étape où une fine cordelette de coton (généralement de couleur noire, mais au fil des temps, des modes et des iemoto, d'autres couleurs sont venues se rajouter comme le blanc, le rouge ou encore le vert) sera passée 3 fois de suite alternativement de l'avant vers l'arrière entre chaque brin (de manière à bien séparer les brins extérieurs de ceux de l'intérieur). Cette technique permet ainsi aux brins d'être régulièrement espacés et placés de façon optimale afin d'éviter que des "grumeaux" de matcha ne viennent s'y former ou s'y coller.

Enfin, le chasen sera mis en forme. Ici encore, on notera qu'il existe de nombreuses variantes en matière de forme, selon les préférences des différentes écoles ou d'utilisation particulière. Chez Sohen ryu Shodenan (宗偏流正伝庵) , la préférence va au type kazuho réalisé à partir de susudake*.

Autant dire qu'il faut une sacrée dose de patience et qu'il ne sera pas donné à tout le monde de fabriquer son propre chasen. D'ailleurs, les artisans capables de réaliser ce travail ont toujours été fortement considérés. Preuve en est le statut social spécial que le shogunat des Tokugawa leur avait accordé vers le début de l'époque Edo. 13 familles jouissaient alors du privilège de n'appartenir à aucune des 4 catégories (samurai / paysans / artisan et marchands) qui classifiaient l'ensemble des sujets de l'empire. Leur place au sein de la société était à part, bien que certains furent également élevés au rang de samurai (et étaient donc autorisés à porter le daisho 大小, la paire de sabres emblématique de cette classe).

Bien entendu, le procédé de fabrication sus-mentionné ne concerne que les chasen de 80 brins (on ne compte que les brins extérieurs pour la dénomination. Un "80 brins" en comporte donc en fait le double). Typiquement, un "80 brins" est employé pour la préparation de usucha (le grand nombre de brins facilitant le mélange du matcha à l'eau, tout en apportant de l'air pour la constitution d'une mousse plus ou moins importante selon les préceptes de telle ou telle autre école). Pour la préparation de okoicha, un "64 brins" est le standard (moins nombreux, les brins plus épais, résisteront mieux au mélange de l'épais breuvage). Mais il existe de nombreuses autres déclinaisons de chasen dont le nombre total de brins peut varier de 72 à 240 !!!

Vous l'aurez compris, malgré son apparente banalité, le chasen est un objet important pour tout chajin qui se respecte. Jusqu'au moins l'époque de Sen no Rikyû (1522–1591), cet ustensile n'était utilisé qu'une seule fois**. Aujourd'hui on veillera à le garder toujours propre (en le lavant soigneusement après usage et en le faisant sécher sur un chasen-naoshi pour qu'il garde sa forme) et l'on pourra l'utiliser tant que tous ses brins resteront intacts (du moins dans le cadre de chanoyu). Lorsqu'un chasen ne pourra plus "rendre son office", la tradition veut qu'il soit rendu à la terre ou brûlé (il existe au Japon une cérémonie religieuse dédiée à l'incinération des "vieux" chasen). Au sein de Sohen ryu Shodenan nous avons aussi une manière toute singulière de les recycler, mais ceci est une autre histoire.

Quoi qu'il en soit, le chasen mérite tout notre respect lorsque nous l'utilisons. La prochaine fois que vous aurez, cher lecteur, l'occasion de voir ou d'utiliser un chasen, essayez de repenser aux efforts nécessaires à sa réalisation. Alors peut être porterez-vous un autre regard sur ce "simple" objet qui, bien que ne suscitant guère d'intérêt comparé aux autres objets de thé, reste irremplaçable et totalement indispensable.

 

à suivre… (ou pas)

* bambous généralement anciens ayant servis à la construction de l'armature de toitures de maisons paysannes : le foyer -irori- de ce genre de maison est situé au coeur de la pièce principale. La fumée ne s'échappe pas par un conduit, mais s'élève directement vers le toit, à l'intérieur de la maison. Ce qui provoque un double effet : cela traite le chaume de la toiture contre les insectes tout en le rendant plus imperméable et cela finit par donner une teinte "ambrée" aux pièces de bambou de l'ossature de la toiture.

** à cette époque, tous les instruments servant à la préparation du thé devaient être dans un état irréprochable . Le chasen était l'un des ustensiles devant être totalement neuf (pour être considéré comme totalement "pur") avant chaque utilisation.



 


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Urushi, la laque japonaise




 

 

140223 - Urushi (laque japonaise)

Pour faire suite au billet 140105 au sujet des usuki 薄器, voici 2 vidéos montrant le long et fastidieux travail nécessaire au laquage d'un conteneur à thé. La première vidéo concerne l'application des nombreuses épaisseurs de laque, entre-coupée de longs séchages* et ponçages.

La seconde met en lumière une technique décorative appelée maki-e (蒔絵), qui consiste à saupoudrer sur un dessin réalisé en laque fraîche, des paillettes d'or ou d'autres métaux précieux. Cette technique est très couramment utilisée pour la décoration des usuki. Des pigments encore plus fins peuvent être également mélangés à la laque pour lui donner un aspect doré ou coloré. En superposant plusieurs couches, on obtient des effets de sur-épaisseur du plus bel effet.



à suivre… (ou pas)

 

* la laque japonaise ne sèche pas à proprement parler. Il s'agit en fait d'une réaction chimique (polymérisation) qui entraîne son durcissement en présence d'humidité. Voilà pourquoi l'on peut voir dans le film, l'artisan "humidifier" le coffre dans lequel les objets à "sécher" sont entreposés, à l'abri de toute poussière. Voilà pourquoi aussi, le travail de la laque se faisait traditionnellement pendant la saison des pluies (梅雨 tsuyu).


 


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Chadôgu - Natsume

 

Chadôgu - Usuki






 

 

140105 - chadôgu (茶道具) > natsume (棗 ).

Le natsume (棗) est un type de contenant à thé (薄器 - usuki, ou 薄茶器 - usuchaki, ou encore 茶器 - chaki) souvent réalisé en bois et employé de nos jours pour contenir le matcha réservé à la préparation de usucha (litt. "thé léger").

Il ne faut pas perdre de vue que jusqu'au début du XVIIe siècle, il n' y avait qu'une seule manière de préparer le thé, celle qui correspond à ce que nous appelons aujourd'hui "koicha", le thé épais. Ce n'est qu'à partir de l'époque Edo que la préparation de usucha se systématisa pour devenir partie intégrante d'un chakai (réunion de thé). Avant cette date, le thé restant après le service de koicha pouvait, soit être offert à l'un ou la totalité des invités (à ce moment là, on le transvasait du "noble et précieux" chaire vers un ou plusieurs "banaux et peu coûteux" usuki - les artisanats nippons du bois et de la laque étaient au XVIe siècle beaucoup plus développés que celui de la céramique), soit être mélangé à de l'eau sans protocole aucun, dans un espace autre que le chashitsu. Rappelons que le thé, denrée précieuse et onéreuse, était moulu au dernier moment afin d'obtenir la meilleure qualité possible. Le thé une fois moulu s'altérant très rapidement, il n'était plus considéré comme "honorable" et ne pouvait donc plus être servi dans les règles de l'Art.

Murata Shuko ( 村田珠光 - 1423–1502 ), considéré comme le père du wabicha (thé "simple", à opposer au thé ostentatoire et dispendieux des nobles et de la cour) serait le premier à avoir utilisé un usuki en lieu et place d'un chaire pour préparer koicha. Plus intéressant encore, il aurait également été le premier à préparer lui-même le thé pour et en présence de ses invités (rappelons qu'au début de l'histoire de chanoyu, le thé était préparé hors de vue des invités dans une salle annexe, par un ou des assistants de l'hôte).

Comme nous l'avons vu précédemment
(voir billet 130512) , les chaire importés du continent à grands frais, étaient de véritables trésors qui par définition ne pouvaient répondre à une demande grandissante de pratiquants et restaient de toute façon, hors de portée financière pour la quasi totalité d'entre eux. Pour palier à cela, Shuko commença donc à utiliser des usuki dont la forme était directement inspirée de celle des hikiya (voir seconde illustration ci-contre) protégeant les chaire. Parmi ceux-ci, le nakatsugi ( 中次, ainsi appelé du fait que sa jointure se trouve en son milieu) et le natsume (il tire son nom de sa forme évoquant le fruit de jujubier ou dattier chinois) sont probablement les plus représentatifs. Du fait de leur analogie aux "karamono", ces usuki commencèrent donc à être utilisés en lieu et place des premiers par les adeptes du wabicha.

Par la suite le développement de la céramique nippone permit de produire un nombre toujours de plus en plus important de "wamono" (copies japonaises d'objet du continent "kamarmono", dont les chaire) et l'on abandonna peu à peu l'utilisation des usuki lors de la préparation de koicha.




à suivre… (ou pas)

 


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